Entretien avec la sage-femme spécialiste en nutrition-Diététique Mme Jeannine AGBO-MONLEMEY LAWANI : « De plus en plus les mamans n’aiment plus allaiter leurs enfants, c’est vraiment dangereux »

Publié le jeudi 30 juin 2016

Une excellente stratégie pour prévenir bon nombre de maladies chez l’enfant, mais aussi chez la mère, et de permettre à la société toute entière de faire des économies, c’est belle et bien l’Allaitement maternel (AME). Dans cet entretien, la sage-femme spécialiste en nutrition Mme Jeannine Agbo-Monlemey- Lawani fait l’état de l’allaitement au Bénin. Pour elle, depuis lors, qu’on a commencé l’allaitement maternel au Bénin, on était à 43% en 2006 et aujourd’hui on est à 33% selon l’enquête démographique de 2011. A ce jour, ce taux est en diminution car les professionnels de santé et les assistants sociaux ne mettent plus l’accent sur cette pratique idéale et aussi socialement, le constat est que les mamans n’aiment plus allaiter leurs enfants car elles craignent que leurs seins ne tombent d’une part et d’autre part pour la femme dans la communauté, la pauvreté grandissante oblige cette dernière à vite reprendre ces activités et ainsi à vite substituer les bouillies. Pour Mme Agbo-Monlemey- Lawani, l’espoir est permis si le Bénin arrive à relever un certain nombre de défis sur ce plan. Au nombre de ces défis énumérés, nous citerons le repositionnement de la nutrition dans le secteur santé ,la révision des textes de congé de maternité attribués aux mères qui travaillent pour favoriser la pratique de l’Allaitement maternel et la mise en place des allocations familiales au niveau communautaire pour les femmes accouchées. Chers lecteurs lisez cet entretien !

Mme Parlez-nous de quelques avantages de l’allaitement maternel.

D’abord, l’allaitement maternel est une excellente stratégie pour prévenir bon nombre de maladies chez l’enfant, mais aussi chez la mère, et pour permettre à la société tout entière de faire des économies. L’allaitement apporte beaucoup d’anticorps à l’enfant pour lutter contre beaucoup de maladies telles que les maladies infectieuses, les maladies respiratoires. La liste est longue. L’allaitement favorise une bonne croissance de l’enfant parce que cela contient des éléments nutritifs assez pertinents et très bons qui favorisent la bonne croissance de l’enfant. En dehors de tout cela, la maman qui allaite maternellement, c’est un facteur psychologique.   Quand elle maternise son enfant en lui donnant le lait cela renforce le lien affectif qui est entre la mère et l’enfant. Et cet enfant est plus intelligent. De plus, la maman qui allaite dès les premières heures à la maternité a le privilège d’avoir une bonne rétraction de l’utérus automatiquement. D’autres avantages relatifs à la maman est que l’allaitement maternel réduit le risque d’avoir le cancer du sein, le cancer de l’ovaire. Et sur le plan de la société de manière générale, l’allaitement économise. Parce que amener 4000 ou 5000F au niveau de la pharmacie pour acheter des laits ou des substituts du lait maternel d’abord cela perd énormément de l’argent à la famille. La famille peut garder et économiser ces sous de lait ou de substitue de lait maternel pour donner à manger aux membres de la famille ou venir aux soins à l’enfant qui est né. L’achat des laits pollue également l’environnement par des boîtes qui contiennent ces laits.

 

Selon vos statistiques est-ce les femmes respectent ces prescriptions de l’allaitement maternel au Bénin ?

Nous avons constaté selon l’enquête démographique de santé qui évolue tous les cinq ans que depuis 1996 que l’allaitement a vraiment été boosté au Bénin car ceci est passé de 14% en 1996 à 43% en 2006 depuis l’avènement et l’adoption de la déclaration d’innocentia en 1990 qui mettant l’accent sur les dix conditions de réussite de l’allaitement maternel et des hôpitaux amis des bébés. Et selon les mêmes statistiques cette pratique a chuté en passant de 43% en 2006 et aujourd’hui on est à 33% selon l’enquête démographique de 2011. A ce jour, je suis sûre que cela a encore diminué parce que socialement en voyant dans les maternités si même l’enquête démographique de 2016 n’est pas encore disponible, le constat est que les mamans n’aiment plus allaiter leurs enfants.

 

Au vu du triste constat fait aujourd’hui sur le faible taux d’allaitement maternel au Bénin, que peut-on faire pour renverser la tendance afin de promouvoir réellement l’allaitement maternel au Bénin ?

Je pense que beaucoup de choses doivent être revues. Premièrement, il faut que le législatif revoie les lois par rapport aux congés de maternité qui sont attribués aux mamans qui travaillent. Deuxièmement, il faut que nous accompagnions nos mères dans la communauté par la mise en place d’un processus d’allocations familiales aux femmes accouchées parce que les maris ne viennent plus sûrement au secours de leurs femmes après l’accouchement et cette dernière est vouée à son sort. Et dès qu’elle finit d’accoucher, elle commence à introduire d’autres bouillies à l’enfant pour dire et voilà moi-même, je dois aller m’occuper de moi-même et m’occuper de l’enfant. Aussitôt avant l’âge de six mois, elle fait des bouillies fluides qu’elle accompagne avec le lait maternel. Même si l’enfant est au dos qu’on l’allaite régulièrement, elle introduit d’autres farines à l’enfant. Ainsi pour atteindre les objectifs 2016-2025 fixés dans le cadre des ODD par rapport à l’allaitement maternel il importe de porter à 60%, le taux d’allaitement maternel exclusif et de contribuer à réduire de 40 % au moins, le nombre d’enfants de moins de cinq ans présentant un retard de croissance. Les défis à relever sont essentiellement le repositionnement de la nutrition dans le secteur santé, la révision des textes de congé de maternité attribués aux mères qui travaillent pour favoriser la pratique de l’AME, la révision et l’application des lois sur la commercialisation des substituts de lait maternel , l’octroi d’une allocation familiale aux femmes accouchées dans la communauté . Par ailleurs je pense qu’il est important de penser à la création des coins d’allaitement par l’employeur et enfin que le cadre légal et institutionnel de la promotion de l’allaitement maternel soit renforcé.

Propos recueillis par Victorin Fassinou(LA PRESSE DU JOUR)


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