Message sur l’état de la nation à l’assemblée nationale : Un dernier crispant discours de Yayi

Publié le mardi 29 décembre 2015

boni internetLe président de la République a sacrifié à la tradition de fin d’année en présentant son discours sur l’état de la nation hier, lundi 28 décembre 2015, à l’Assemblée nationale à Porto-Novo. Un émouvant exercice pour le chef de l’Etat puisqu’il n’en fera jamais plus un autre. En fin de mandat, Boni Yayi a saisi l’occasion pour ramasser ce qu’il a fait en  dix ans à la tête du pays. Mais il aura failli sur bien de points sur lesquels il était attendu.

Yayi a fait son bilan à la tête du Bénin depuis dix ans. Seulement, en face des représentants du peuple, il se serait retenu de dire certaines de ses vérités. Premier point : la fameuse prospérité partagée. «Depuis bientôt dix (10) ans, avec la synergie d’action des Institutions de la République, j’ai œuvré pour que soit assurée la prospérité pour tous les citoyens béninois, conscient du fait que le processus de développement d’une nation s’inscrit dans la durée et suppose une transformation positive dans l’éthique, la morale et les mentalités de la population. Ce qui est ma vision et ma responsabilité, c’est de lutter contre la pauvreté sous toutes ses formes dans le contexte d’une croissance inclusive et résiliente et de mettre en place les fondements d’un développement durable. Ainsi, malgré les limites inhérentes à toute œuvre humaine, j’ai la conviction que les politiques mises en œuvre ont permis des avancées certes significatives, mais susceptibles d’être consolidées dans la durée». En réalité, ce n’est malheureusement pas le cas de l’opinion publique. Aujourd’hui, le panier de la ménagère s’est considérablement amenuisé par rapport à il y a dix ans. Un tour dans les marchés, dans les centres commerciaux pour s’en apercevoir. Le béninois moyen pour lequel le gouvernement de Yayi dit avoir travaillé a du mal à s’assurer les trois repas du jour. Cette prospérité a été partagée par une frange très infirme des Béninois. Une minorité s’est enrichie au détriment de l’Etat et des Béninois. La preuve, consciemment ou inconsciemment, on présente Lionel Zinsou, le candidat de Yayi, comme celui qui vient pour «sortir les Béninois de la pauvreté». Reconnaissant donc que sous Yayi, la pauvreté a accru au sein des populations. Un vrai désaveu pour le président sortant. Deuxième éléments : la gouvernance politique. A cet effet, Yayi a déclaré hier : «Au plan de la gouvernance politique, soucieux du renforcement de l’édifice constitutionnel de notre pays, mon Gouvernement a mis en œuvre une série de réformes politiques et institutionnelles destinées à consolider et amplifier les acquis de la Conférence des Forces Vives de la Nation de février 1990. Dans cette optique et de concert avec votre auguste Assemblée, d’importantes lois ont été votées notamment :

– la loi portant code électoral en République du Bénin qui aura permis de regrouper les lois électorales éparses, facilitant ainsi la conduite du processus électoral. A l’épreuve des faits, il apparait que ce code devra être à nouveau revu et complété pour corriger ses insuffisances ;

– la loi portant lutte contre la corruption et les infractions connexes avec l’installation effective de l’Autorité Nationale de Lutte contre la Corruption.

En outre, mon Gouvernement en collaboration avec les Institutions concernées a veillé à la tenue régulière des élections communales, législatives et présidentielles, toutes choses qui participent du renforcement de nos acquis démocratiques». Tenue régulière des élections, pas du tout. Car, c’est sous le régime du changement que les élections n’ont jamais été organisées à bonne date. Il y en a qui ont été retardées de plus de deux ans. La corruption, pour une première au Bénin, aura différé un don extérieur pour le Bénin, le Mca des Américains. Si non que comme l’a dit l’autre, si avant on mangeait avec la cuillère, depuis 2006, c’est avec la louche, voire avec le godet d’une pelleteuse. Yayi aura beau marché contre la corruption, il s’avère justement que c’est l’un des points sur lesquels sa politique a échoué. Que dire des relations entre les institutions ! Il faut plutôt parler de vassalisation des institutions de contre-pouvoir sous le régime du changement.

Troisième point : le dialogue politique. «A l’analyse, pour approfondir le processus démocratique en cours, il parait indispensable d’aller encore plus loin dans les réformes. Pour ce faire, il est absolument nécessaire d’instaurer un dialogue politique au sein du Peuple et de toute la classe politique. Il permettra, sans aucun doute de surmonter les méfiances, de discuter aux fins de réaliser l’union sacrée pour aborder dans la sérénité et le patriotisme les problèmes auxquels se trouve aujourd’hui confronté notre pays le Bénin (…)». Là encore, on ne peut dire que Yayi a œuvré pour l’unité nationale. Puisque aujourd’hui, il y a des Béninois du nord, du sud, de l’est et de l’ouest. Yayi n’a aussi jamais instauré un réel dialogue politique au sein du peuple et de la classe politique. Il a plutôt réussi à diviser cette classe politique, donc le peuple aussi. Et lorsque Yayi déclarait hier dans son discours d’ouvrer «pour l’union sacrée de notre Peuple pour régler dans la sérénité les défis auxquels fait face notre pays le Bénin, un don de DIEU, que nous avons le devoir d’entretenir et de transmettre plus beau, plus uni et plus prospère que nous l’avons reçu aux générations futures. Bon vent dans vos fonctions !», on se demande pourquoi il ne l’a pas fait en dix ans. Au terme de son discours hier, le chef de l’Etat a reçu une ovation. C’est peut-être un ouf de soulagement pour beaucoup d’honorables députés.

Jean-Marie Sèdolo


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