Budget participatif dans les collectivités locales : Un puissant mécanisme d’éducation à la citoyenneté

Publié le mercredi 14 septembre 2016

Le Budget Participatif  est désormais un outil de développement local. Il permet développement. Pour l’expérimenter, le conseil communal de chaque collectivité locale doit être prêt pour la transparence totale dans sa gestion.

« Le budget participatif est un puissant mécanisme d’éducation à la citoyenneté et à la gouvernance locale qui a fait ses preuves dans d’autres communes surtout en Amérique latine. C’est le pari de la transparence et de l’implication des populations dans les prises de décision au niveau local.  Lorsqu’il est réussi, les populations participent activement à la vie locale, n’hésitent pas à payer de leur poche la réalisation des infrastructures ce qui fait que le budget augmente d’année en année… Mieux, les élus qui mettent en place ce mécanisme sont assurés d’être régulièrement réélus », avait enseigné le secrétaire général de Cités et Gouvernements Locaux Unis d’Afrique (CGLU Afrique),  Jean-Pierre Elong Mbassi, aux élus locaux de la première mandature de la commune de Sèmè-podji. « Pour se lancer dans ce programme politique qu’est le budget participatif, le conseil communal doit être prêt pour la transparence totale dans la gestion de la commune. Rien ne doit plus être géré avec opacité. Lorsqu’on s’y engage, les populations n’admettent plus de recul », ces propos du spécialiste en décentralisation qui a suivi de près les expériences du budget participatif dans d’autres pays, ont du coup changé d’humeur à ces conseillers communaux qui n’étaient pas encore prêts pour une gestion transparente. « Heureusement que vous avez introduit ce préalable » ont tous déclaré pour confirmer leur position. Alors qu’ils étaient élus pour le développement de la localité. C’est un peu ce qui se passe dans les communes du Bénin. Si bien que jusqu’à présent, les collectivités locales n’ont pas encore convaincu leurs administrés de leur gestion.

En fait, le budget participatif aide le maire et son conseil à réussir leur mission. Il est sans doute de croire que si le budget participatif était effectif dans les communes dont les maires sont sous menacent de destitution, on  n’assisterait pas à de telles situations inquiétantes. Puisque, avec le budget participatif, la population est au cœur des décisions. Elle  va désapprouver les conseillers dissidents et expliquer en clair la vraie situation. Le Budget Participatif est ouvert à tout habitant à partir de 16 ans, jeunes, vieux, mères de famille, étudiants, chômeurs, cadres, syndicalistes, etc.

 Modalités de mise en œuvre

 Dans une de ses communications, le secrétaire général de Cités et Gouvernements Locaux Unis d’Afrique (CGLU Afrique),  Jean-Pierre Elong Mbassi, a indiqué quatre étapes majeures pour la mise en œuvre du budget participatif. La première est la volonté politique clairement affichée des décideurs. « Le budget participatif est d’abord et avant tout une décision politique », a-t-il expliqué. Ensuite, il faut une phase d’information et de sensibilisation aussi bien des populations, des élus locaux que des agents de la commune sur les mécanismes de mise en œuvre du budget participatif, le rôle de chaque acteur et les implications attendues. La troisième étape qui est en fait la première phase concrète du processus est l’identification des populations aux arrondissements. C’est ce que les spécialistes en décentralisation appellent le débat sur l’appartenance de chaque citoyen à un arrondissement. C’est au niveau de cet arrondissement  reconnu par le citoyen qu’il exercera ses droits et devoirs dans le cadre du budget participatif. Le conseil communal à son tour entérine de faire les structures infra communales reconnues par les populations et installe au niveau de chaque arrondissement un comité de budget participatif. C’est le cadre d’exercice du budget participatif et toute la population concernée par cet arrondissement a droit à la parole. Une fois ce cadre installé, on passe à la phase de spatialisation des ressources et des dépenses de la commune. Quelles sont les quartiers qui contribuent le plus au budget de la commune et quels sont les quartiers qui reçoivent le plus les investissements de la ville ? Pour mieux gérer cette phase, le conseil communal doit se doter du registre foncier de la commune.

 Budget contraint et budget non contraint

 La commune dans un premier temps élabore le volet fonctionnement (salaires, fournitures de travail…) du budget. Au fonctionnement, on ajoute certaines dépenses communales les équipements d’assainissement. Le conseil vote des crédits pour les dépenses répertoriées dans le budget dit contraint. Ces choix peuvent être soumis aux populations pour des discussions légères. Les vraies discussions étant réservées à la partie du budget dite budget non contraint.

A ce niveau, le conseil évalue le crédit disponible et non affecté. C’est de son affectation que décide la population. Il y a plusieurs méthodes d’affectation. Celle indiquée par Jean-Pierre Elong Mbassi est la division de l’enveloppe disponible par le nombre d’arrondissement. Chaque arrondissement décide de l’affectation de la part qui lui est réservée. Autour de cette enveloppe, les populations se réunissent et décident de leurs priorités. Cette priorité est évaluée en argent et la mairie engage des discussions avec les populations en cas de dépassement de l’enveloppe prévue. Très souvent explique Elong Mbassi, les populations acceptent de financer le manque de crédit. Après cette étape, il est parfois nécessaire de faire des arbitrages entre arrondissement. Ces derniers arbitrages mettent fin au processus et le conseil peut voter son budget avec la certitude d’avoir pris en compte les aspirations des populations. Dans la mise en œuvre, les populations sont également associées.

Le principe du Budget participatif est «  ensemble, nous allons identifier les problèmes à régler, établir la hiérarchie des urgences et des investissements, examiner leur compatibilité avec les ressources disponibles, quitte à augmenter ces dernières par des mesures fiscales redistribuant la richesse des plus privilégiés vers les plus démunis ». Ce système oblige le maire à tenir ses promesses électorales.  Un tel exercice ne laisse aucune place à la démagogie, encore moins au clientélisme ou à la corruption : de l’élection des délégués à la procédure de gestion des appels d’offres, tout est transparent. Le maire va donc créer peu à peu divers outils qui placent les citoyens au centre des choix, son rôle étant d’assurer que   les services de la mairie fonctionnent en respectant leurs volontés.

 Historique du concept de budget participatif

Porto Alegre est une ville de 1 500 000 habitants du sud du Brésil. En 1988, le Parti des Travailleurs (PT) se présente aux élections municipales, avec un double message politique, en direction des plus pauvres : « On veut améliorer vos conditions de vie, mais on le fera avec vous. C’est vous qui nous direz ce que vous voulez. «  Dès que le nouveau maire du parti travailliste, Olivio Dutra, est élu, les communautés de base font le siège de la mairie, réclamant les investissements indispensables pour leurs quartiers. La nouvelle équipe au pouvoir à la mairie, qui n’a aucune expérience de gestion, découvre une situation financière catastrophique, puisque 98% du budget sont absorbés par les salaires des fonctionnaires, ne laissant aucune marge de manœuvre pour d’autres choix, en particulier pour intervenir en direction des plus pauvres. Devant ces grandes difficultés, le maire joue cartes sur  table avec les communautés de base. Il leur expose les difficultés budgétaires et ensemble ils cherchent à sortir de cette impasse. La première urgence pour la mairie ne consiste pas à répartir les miettes disponibles, mais à accroître de manière substantielle les recettes, tout en restant fidèle à sa priorité politique qui est de gérer la ville au profit des classes pauvres. C’est ce premier travail en commun avec la population qui jette les bases de ce qui deviendra le Budget Participatif.

 Lexique de la décentralisation

 Attractivité d’un territoire : l’attractivité peut être définie comme la capacité à attirer les activités nouvelles et les facteurs de production mobiles (capitaux, travailleurs qualifiés) sur un territoire. De par sa définition la plus simple et la plus large admise, l’attractivité est : «  la capacité d’un territoire à attirer et à retenir les populations et les entreprises, dans un contexte de mobilité croissante au plan international et national ». Dans le contexte de l’aménagement du territoire, l’attractivité est déterminée par la capacité d’un territoire à attirer des populations ou des investisseurs du fait de son niveau d’équipements et d’infrastructures de tous genres.

 Bon à savoir

 Le «PubliForum» : c’est une Méthode inspirée par les conférences de consensus initiées au Danemark dans les années 80, le premier publiforum a vu le jour en Suisse sur le sujet de « Électricité et société « en 1998. En 1999, un publiforum sur « Génie génétique et alimentation « a eu lieu. La méthode est aujourd’hui utilisée de plus en plus régulièrement avec des résultats intéressants. La méthode est largement inspirée des conférences de consensus danoises. Il se base sur un panel d’une trentaine de personnes choisies sur des critères sociodémographiques à partir de réponses à un mailing de 10000 envois aléatoires (méthode suisse, d’autres utilisations peuvent faire varier ce système). Ce panel est choisi par un groupe d’accompagnement composé de divers représentants des milieux concernés. Un document d’information est distribué aux membres du panel sous forme d’une fact-sheet et une liste de personnes de référence est constituée. Lors d’un premier week-end préparatoire, les participants font connaissance, se familiarisent avec la méthode de travail, s’informent sur les thèmes de recherche et définissent les aspects qu’ils souhaitent approfondir pendant le publiforum. Le second week-end préparatoire est consacré à la définition des questions qui seront posées et au choix des personnes de référence qui viendront y répondre. Enfin, le publiforum, se décompose en une première partie publique, consacrée aux questions des participants et aux réponses des experts et une seconde partie à huis-clos afin de délibérer et de rédiger un rapport final qui sera présenté au public lors d’une conférence de presse. Les trois week-ends sont séparés par un mois et demi afin de permettre aux participants d’approfondir leurs réflexions.

 Réalisé par Gilles G. Gnimadi (Stag)


via La Presse du Jour http://ift.tt/2cqznkN
Categories: ,