A cœur ouvert avec l’Honorable Léon Basile Ahossi : « 2016 est un sens giratoire à négocier avec tempérance, prudence et esprit de suite »

Publié le dimanche 1 novembre 2015

A quelques mois de la grande échéance des élections présidentielles de février 2016, on observe un calme prudent de la part de la classe politique. Le vacarme qu’on enregistre çà et là pour susciter la candidature d’un tel ou d’un autre n’est que le fait de groupuscules qui tentent sans grand succès de se donner de la visibilité. Par ailleurs, on note qu’aucun candidat de poids politique ne se démarque. Doit-on conclure qu’après la génération des Kérékou, Soglo, Amoussou, et autres Houngbédji, la politique échappe désormais aux politiciens ? Certains le pensent, mais au regard du douloureux épisode des dix années qui finissent, on aurait tort de tirer une telle conclusion. C’est pour en savoir plus sur la question que votre journal s’est rapproché d’un député devenu très discret depuis son retour à l’Assemblée Nationale pour le compte de la 7è législature. Comlan Léon Basile Ahossi, pour ne pas le citer, a accepté de répondre à nos questions aussi bien sur les échéances qui s’annoncent que sur d’autres sujets brûlants de l’actualité sociopolitique nationale.

Depuis le début de la 7è législature de l’Assemblée Nationale, vous avez adopté un profil bas. On ne vous voit pas. On ne vous entend pas. Dites-nous ce qui motive cette attitude ?

Merci pour l’occasion. C’est vrai que depuis le début de cette législature, je ne me suis pas fait voir. Je n’ai pas beaucoup pris la parole. Vous n’avez presque pas entendu parler de mois. Mais admettez que cela relève de l’ordre normal des choses. Toutes les fois que par le passé je me suis fait voir ou entendre, c’est assurément parce que les circonstances les rendaient nécessaires. J’estime que les sorties médiatiques ou épistolaires devraient être des événements dans lesquels le peuple découvre un message.

N’est-ce pas tout de même un peu curieux que l’homme du G13 pendant la 5è législative, des lettres fermées et ouvertes audacieuses à la 6è législative se retrouve absent de la scène sous la présente législature ?

C’est vrai que des citoyens arrivent à se demander si je suis encore à l’Assemblée Nationale. Certains vont plus loin en se demandant si je suis encore dans le pays. Oui, je suis là. La 7è législature vient à peine de commencer et elle s’ouvre sur un événement majeur pour tout acteur de la vie politique : les élections présidentielles de 2016. L’heure est donc beaucoup plus à la réflexion politique, aux analyses, aux échanges qu’à l’activisme politique. Après les expériences des deux précédentes législatures, je m’emploie à apprendre, oui apprendre à faire, apprendre à dire, aux côtés de gens comme Amoussou, Idji, Sèhouéto, et au niveau de l’Assemblée Nationale, à puiser dans la riche expérience de gens comme Me Adrien Houngbédji ou autre Sacca Lafia que j’ai découvert au détour du Cos-Lépi. C’est aussi vrai que je n’ai pas fini d’envoyer mes lettres à Yayi Boni. Vous savez qu’il adore les scandales et qu’il ne s’en prive pas en ce moment où il fait sa valise. Quant à l’évocation du G13, je dois dire que cela a été une expérience très enrichissante tant elle m’a permis de connaitre les hommes, de comprendre que derrière les belles façades se cachent les bassesses de toute sorte, de compromissions puantes ; elle m’a appris que la morale et les ambitions ne font pas toujours bon ménage, que dans la vie, chacun court après ce qui lui manque.

Parlant des leaders de votre alliance politique, vous avez dit que vous apprenez à faire, à dire. Que vous dites-vous par rapport aux échéances de 2016 ?

2016 est comme un sens giratoire à négocier avec tempérance, prudence et esprit de suite. Le pays va tenter de sortir d’un tremblement de terre, tant ses fondamentaux sont détruits. Je reconnais avec beaucoup de mes concitoyens que beaucoup de routes ont été construites ou réhabilitées. Mais en même temps, je partage avec eux le sentiment d’un pays qui n’a plus d’administration, qui n’a plus de repère, qui n’a plus de moral, qui n’a plus d’école, bref un pays vandalisé, un pays où tout est à recommencer. Je sais aussi que ce travail ne sera pas celui d’un seul camp (opposition ou mouvance). Au sein des Fcbe existent des valeurs réelles, des hommes et des femmes qui ont cru qu’on pourrait compter sur Yayi, des gens qui malheureusement, sont allés loin, très loin pour certains, et trop loin pour d’autres dans la fidélité à un homme qui ne le mérite pas. La preuve est que dans le navire Fcbe aujourd’hui, vous ne verrez plus aucun, je dis bien aucun de ceux qui ont mis la barque à l’eau. Le dépit a débordé les limites de la politique pour s’inviter dans la famille (parente ou alliée) de Yayi. C’est bien triste ! Mais c’est avec tous ceux-là qu’il faut, de mon point de vue, qu’on envisage 2016 et la suite. Ce sont là les vertus que je voudrais cultiver aux contacts des personnalités que j’ai cité plus haut. Le temps avance, nous presse, mais vous constatez aussi qu’aucun des ténors de la classe politique ne se prononce. Ils ont raison. Réfléchissons beaucoup afin de ne pas commettre les erreurs euphoriques comme en 2006.

L’actualité ces derniers temps a été agitée par le dernier concours de recrutement organisé par le ministère de la fonction publique au profit du ministère des finances. Que pensez-vous de ce concours ?

Lamentable ! C’est cela les hommes qui nous dirigent. J’ai d’abord constaté qu’on a ramené presque tous ceux qui étaient sur la liste du concours précédemment annulé, que bien que les épreuves se soient déroulées au même moment sur tout le territoire, des candidats ont réussi à deux concours différents, que ce sont surtout les candidats proches du pouvoir, des fonctionnaires de l’administration des douanes qui ont été retenus par la cellule spéciale installée au Palais de la République. Quand j’ai suivi le ministre de la fonction publique à la télévision, j’ai eu pitié, pitié de lui pour aujourd’hui et pour demain. Ceux qui ont souvent parlé de lui disent beaucoup de bien de lui. Mais je l’ai vu faire l’avocat d’un système pourri et en putréfaction. Je suis sûr ! Si ce que je sais de lui est vrai, il regrettera tôt ou tard d’avoir investi son honneur dans cette bêtise car, celui au service de qui il est, est un homme de circonstance. Il est allé jusqu’à dire des injures sur Laurent Mètognon qui n’est pas un nouveau venu dans ce combat. Il a affirmé que les centrales syndicales sont divisées. C’est bien triste ! Ce concours doit simplement être annulé. Aucune structure ne peut à ce jour accueillir 500 douaniers pour la formation de base, même pas les locaux de la gendarmerie et les camps militaires. Je comprends ; on veut faire le plein avant de partir et on encombre la République de souillures.

Quel appel avez-vous à lancer aux Béninois qui, face à cette désastreuse situation, désespèrent ?

J’appelle notre peuple à la veille permanente, surtout en cette veille d’une échéance électorale aussi cruciale que constitue la présidentielle du 28 février 2016. Je note que ces derniers temps, la mode est à faire élire les Présidents ou à obtenir ce que souhaitent nos maîtres à penser de l’étranger dès le premier tour. Nous en avons été victimes en 2011. Veillons afin que cela ne se reproduise en 2016. Nous ne devons pas désespérer. Gardons toujours espoir que le meilleur reste à venir.

Propos recueillis pour « La Presse du Jour » par Affissou Anonrin


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