Accord Nerwaya Multivision et Canal + : L’Association burkinabè des consommateurs grince des dents

Publié le mardi 1 septembre 2015

Ceci est une déclaration de l’Association burkinabè des consommateurs de services de communication électronique, dans laquelle elle indexe la cherté des prix pratiqués par les entreprises de chaînes de télé cryptées et l’accord signé entre Nerwaya Multivision et Canal + Afrique.

L’Association Burkinabé des Consommateurs de Services de Communications Electroniques (ABCE) voudrait par les présentes, marquer son indignation par rapport aux prix pratiqués par les sociétés CANAL + AFRIQUE et Neerwaya Multivision aux consommateurs.

Notre association a appris dans la presse, à l’instar de plusieurs burkinabè, que les sociétés CANAL + AFRIQUE et Neerwaya Multivision sont parvenues à un accord relatif à la diffusion de certaines chaines de télévisions notamment les chaines canal +. Si cet accord peut participer d’une certaine bonne collaboration entre ces deux structures, il est à relever qu’il a été fait au détriment du consommateur.

En effet, suite à cet accord, la diffusion des chaines Beinsport a été interdite à la société Neerwaya Multivision sous le prétexte que l’exclusivité de la diffusion des chaines sportives appartient à la société CANAL + AFRIQUE au Burkina Faso.

Bien plus cet accord, qui a tout d’une imposition, semble obliger la société Neerwaya Multivision à vendre les chaines CANAL + uniquement en option. En conséquence, un client de Neerwaya Multivision intéressé par les chaines canal + est obligé de souscrire préalablement à un abonnement de 2 000 FCFA minimum toute chose qui augmente drastiquement le coût du service.

En réalité, cet accord qui est un pis-aller pour Neerwaya Multivision a entrainé pour celle-ci un manquement grave à ses obligations contractuelles vis-à-vis des consommateurs. A titre illustratif, les consommateurs qui avaient souscrit pour le bouquet sport ont dû se résoudre à accepter la suppression des chaines Beinsport sans avertissement et sans la moindre compensation.

C’est pourquoi l’ABCE invite la société Neerwaya Multivision à prendre sans délai les mesures en vue de la réparation des préjudices subis par ces consommateurs.

Sans nous attarder dans cette déclaration sur la problématique de l’exclusivité de la diffusion des chaines sportives par CANAL + AFRIQUE au Burkina Faso, l’ABCE estime que cet accord est la manifestation de l’exploitation abusive d’une position dominante de la part de CANAL + Afrique. En effet au sens de l’article 4 du règlement n°02/CM/UEMOA du 23 mai 2002 relatif aux pratiques anticoncurrentielles au sein de l’UEMOA, «  est incompatible avec le Marché Commun et interdit, le fait pour une ou plusieurs entreprises d’exploiter de façon abusive une position dominante sur le Marché Commun ou dans une partie significative de celui-ci.

Sont frappées de la même interdiction, les pratiques assimilables à l’exploitation abusive d’une position dominante, mises en œuvre par une ou plusieurs entreprises. Constituent une pratique assimilable à un abus de position dominante les opérations de concentration qui créent ou renforcent une position dominante, détenue par une ou plusieurs entreprises, ayant comme conséquence d’entraver de manière significative une concurrence effective à l’intérieur du Marché Commun ».

Ainsi l’abus de position dominante peut-elle consister à imposer de façon directe ou indirecte des prix d’achat ou de vente ou d’autres conditions de transactions non équitables ou à appliquer à l’égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence.

Il n’est de doute que la plus grande part du marché burkinabè est occupée par CANAL, Neerwaya Multivision n’étant implanté qu’à Ouaga, Bobo et Koudougou. De plus, les autres opérateurs du marché payent les droits de diffusion avec CANAL + qui domine ainsi le marché de distribution de chaines de télévision.

Fort de cette position dominante, CANAL + offre ses services aux autres distributeurs comme Neerwaya Multivision en leur imposant les conditions de vente aux fins de les désavantager dans la concurrence.

Ce prétendu accord transactionnel n’est rien d’autre qu’un accord visant à restreindre le libre exercice de la concurrence sur le marché en obligeant Neerwaya Multivision à aligner ses prix sur ceux pratiqués par CANAL + AFRIQUE, à la demande bien évidemment de cette dernière, aux fins de protéger sa part de marché. A titre illustratif, CANAL + AFRIQUE impose à Neerwaya Multivision de ne vendre le « bouquet CANAL + AFRIQUE » qu’en option et au prix de vente qu’elle applique à ses clients.

Il est clair que CANAL + contrôle et fixe directement ou indirectement les prix des services offerts par Neerwaya Multivision et d’autres distributeurs en faisant obstacle à la libre fixation par le jeu du marché, ce qui entraine une hausse artificielle au préjudice du consommateur.

Par ailleurs même si la qualité des services offerts par CANAL + est décriée, puisqu’il suffit d’une petite goutte de pluie pour que les images disparaissent, elle est nettement supérieure à celle proposée par Neerwaya Multivision.

Pourquoi alors imposer les mêmes prix pour des services de qualité différente ? De notre point de vue, il est inadmissible que des entreprises qui n’offrent pas une même qualité de service   pratiquent les mêmes prix aux consommateurs sur le fondement d’un accord.

Outre cela, l’ABCE dénonce la cherté des prix pratiqués par ces entreprises à leurs clients. Il semble pourtant que la création de CANAL + Burkina était motivée par l’idée de la société de se rapprocher davantage de ses clients burkinabè et de leur proposer des services et des tarifs en tenant compte de leurs réalités économiques. On constate malheureusement que les prix ne sont pas à la portée du Burkinabè moyen, avec des prestations souvent approximatives, en témoigne le foisonnement des griefs des consommateurs sur les ondes de certaines radios lors des émissions interactives.

La rupture de l’accès d’une chaine ou plusieurs chaines pourtant payées par le consommateur est monnaie courante sans la moindre excuse de la part de l’entreprise qui encaisse sans malheureusement pourtant servir. Certes, il nous sera opposé tout de suite le principe de la liberté des prix prônée par l’article 1 de la loi n°15-94 portant organisation de la concurrence au Burkina Faso qui dispose que « Les prix des produits, des biens et des services sont libres sur toute l’étendue du territoire et déterminés par le seul jeu de la concurrence ».

Mais, il est évident qu’un attentat à cette libre détermination du prix par le libre jeu de la concurrence est commis par la société CANAL + suivant l’accord sus-mentionné. Nous constatons d’ailleurs avec émoi la bataille qui est menée pour empêcher de nouvelles initiatives entrepreneuriales ayant le même objet social dans notre pays, toute chose qui ôte la chance aux consommateurs d’avoir un choix à faire entre plusieurs prestataires dans le même domaine d’activités.

Tout en dénonçant l’installation parallèle des décodeurs pirates aux fins d’accès à ces chaines dont les entreprises sont pourvoyeuses d’emplois directs et indirects pour notre jeunesse, l’ABCE estime que cette attitude malheureuse peut aussi se justifier par la chèreté des prix pratiqués aux consommateurs.

D’ailleurs, une politique équitable des prix qui tiennent compte du pouvoir d’achat des consommateurs pourrait à la fois susciter d’autres abonnements du fait du prix appliqué et décourager ces pirates. Demander au Burkinabè moyen de débourser au moins 15 000 FCFA par mois pour avoir accès aux chaines sportives, de divertissement et de culture générale nous semble excessif.

L’ABCE invite les entreprises CANAL + AFRIQUE et Neerwaya Multivision à revoir les termes de leur accord en vue de sauvegarder l’intérêt du consommateur qui subit ses conséquences fâcheuses par la hausse sensible des prix qui étaient déjà chers.

Dans le cas contraire, c’est aux consommateurs de prendre leurs responsabilités à travers des actions visant aussi à boycotter les produits de ces entreprises. C’est une évidence que ces chaines de télévisions nous permettent de nous divertir et nous cultiver dans une certaine mesure, mais elles ne sont pas indispensables à notre quotidien comme d’autres biens et services de première nécessité.

Un boycott mensuel des services de ces entreprises qui ne prennent pas en compte les préoccupations des consommateurs est un sacrifice salutaire et indispensable à tous pour avoir des services de bonne qualité à des prix raisonnables. Sous réserve d’une réaction positive au cri de cœur des consommateurs, l’ABCE, convaincue que les consommateurs sont les victimes de cette pratique anticoncurrentielle de  CANAL + AFRIQUE , n’exclut pas la saisine de la Commission de l’UEMOA qui est l’autorité compétente de répression des pratiques anticoncurrentielles.

Par ailleurs, l’ABCE interpelle les autorités compétentes de l’Etat Burkinabè, garant de la protection des consommateurs, à s’intéresser davantage au contrôle des activités de ces entreprises dans le sens de renforcer la confiance du consommateur au marché, gage d’une croissance économique d’intérêt commun, car le consommateur bien qu’étant le maillon le plus faible du marché demeure pourtant le plus important. Sans consommation, il n’y a ni production ni croissance, tel n’est pas le souhait de l’ABCE !

Pour le bureau exécutif de l’ABCE, le président

Seydou BARRO


NDLR : Le titre est de la Rédaction B24


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