Archives et bonne gouvernance : Moyens de défense des droits et devoirs des administrés

Publié le lundi 23 mars 2015

A quoi servent les archives ? Si non à quoi servent les archives dans un pays où les citoyens ont maille à partir avec l'institution judiciaire ? A quoi servent les archives dans le contexte actuel de notre pays où les citoyens réclament çà et là que justice soit rendue ? Et que dire des récents évènements au cours desquels des archives et autres documents à valeurs probatoires et/ou informationnelles ont été consumés avec la furie populaire ? Ces questions méritent d'être posées quand on observe l'état des documents dans les services et administrations publics.




Toute personne physique ou morale est productrice et utilisatrice de documents. Les personnes physiques possèdent des archives dites privées qu'elles prennent soin de préserver précieusement et jalousement car elles constituent leur « trésor », c'est-à-dire des preuves irréfutables et des justificatifs irrésistibles. Placées entre les administrés et l'administration, les archives permettent aux deux parties d'être gagnantes et font office d'interface en permettant l'examen d'activités tenues secrètes au moment où elles s'exécutaient. Les archives constituent donc un instrument essentiel à la connaissance des décisions gouvernementales, des actions des administrations, des conseils municipaux et des tribunaux qui sont les fondements de la démocratie.


La conservation des archives participe de la bonne gouvernance tant revendiquée par les autorités sur les antennes radio et télé. La gestion de l'information est à la base de la capacité de tout gouvernement à fournir des services efficaces à ses administrés, à concrétiser son devoir de rendre compte aux citoyens et à protéger leurs droits. En tant que mémoire de l'administration, on peut dire que les archives appartiennent aux citoyens en mettant à leur disposition dans les limites imposées par les lois d'accès aux documents, des informations et des renseignements authentiques, significatifs et accessibles non seulement pour attester de leurs droits mais aussi pour fournir les ressources leur permettant d'exercer un contrôle démocratique indispensable à l'exercice d'imputabilité.


Transparence administrative et financière


Les documents sont créées par des individus, des entreprises privées ou des administrations publiques à des fins diverses. Leur bonne conservation permet la reconstitution d'événements politiques, sociaux, économiques et culturels, et de retracer leurs origines en permettant d'accéder aisément aux sources, quels que soient la date, le responsable, le lieu et le commanditaire, etc. De plus en plus, les citoyens veulent constater par eux mêmes et voir de leurs yeux, ce qui a été fait, à combien ?, par qui ? Et pourquoi ?


Est-ce pour cette raison que lorsqu'il y a changement de poste, le sortant s'empresse de vider armoires, tiroirs et placards dans le but de faire disparaître toutes traces compromettantes ? Il ignore ou fait semblant d'ignorer que passation de service suppose aussi transfert d'expertise administrative d'un responsable à un autre qui assure au nouveau une connaissance des actions déjà entreprises ou en cours. Ceci pourrait expliquer le fait que dans la plupart de nos administrations, les structures de gestion des archives sont beaucoup plus figuratives qu'opérationnelles, dépourvues de tout (Ligne budgétaire, matériels, infrastructures, personnels). Cela semble une volonté affichée des premiers responsables de ces services : « Pas de traces compromettantes sur mon passage dans cette boîte ». Cet état de fait rend très difficile les activités liées aux contrôles, aux audits, aux suivis et à la prise de bonnes décisions. Dans notre pays par exemple, des mairies et des établissements primaires ou secondaires sont parfois incapables de fournir les souches des extraits de naissance ou de bulletins de notes. Et que dire de ces ouvrages et autres infrastructures publiques qui ne peuvent être réhabilités faute d'archives les concernant.


L'ancien président, François Mitterrand disait ceci : « Les archives de tous les pays, en gardant la trace des actes d'hier et leurs cheminements, éclairent mais aussi commandent le présent. Ceux qui exercent une responsabilité savent bien qu'on ne définit pas des orientations dans l'ignorance du passé ».


Les archives contribuent à une plus grande transparence administrative et financière donc, participent de la lutte contre la corruption, les détournements et autres irrégularités. Instruments au service de l'État pour la conduite des affaires, la bonne gestion des documents est la garante de son efficience et de son efficacité, des solutions aux problèmes présents et futurs.


Chers décideurs, la lutte contre la corruption, les détournements de toutes sortes et les autres formes d'abus de biens publics passe aussi par la mise en place d'une bonne politique de gestion des archives.


Albert Windyam OUEDRAOGO, archiviste d'Etat

ouedwindy@yahoo.fr





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