Transition politique : le Burkina Faso à l'épreuve de la réconciliation
C'est officiel depuis ce jeudi 04 décembre 2014, la Commission de la Réconciliation nationale et des Réformes a une existence formelle. L'acte de naissance a été signé par le Président de la transition, Président du Faso, Michel Kafando.
Deux articles composent le décret portant création de cette Commission qui sont exactement libellés ainsi qu'il suit.
Article 1 : Il est créé auprès du Premier Ministre une Commission de la réconciliation Nationale et des Réformes.
Article 2 : L'organisation, le fonctionnement, les attributions et les procédures applicables devant la Commission de la réconciliation Nationale et des Réformes seront fixés par un décret du Président du Faso, pris en Conseil des Ministres.
La commission qui prend ainsi progressivement forme est une récommandation de la Charte de la transition. Une charte qui lui a suggéré les sous- commissions suivantes : la sous-commission vérité, justice et réconciliation nationale ;
la sous-commission des réformes constitutionnelles, politiques et institutionnelles ;
la sous-commission réforme électorale ;
la sous-commission finances publiques et respect du bien public ;
la sous-commission gestion des médias et de l'information.
Avec la charge “de restaurer et de renforcer la cohésion sociale et l'unité nationale”.
La première commission vérité est africaine
Sauf omission, c'est la première fois que le pays des hommes intègres dispose un tel cadre. Il y a eu les assises des Tribunaux populaires de la révolution en 1984, jugées trop expéditives et à vocation judiciaire ; mais aussi la journée de pardon sous instigation du Collège des sages en 2000, initiative trop symbolique aussi puisque n'abordant pas le fond du problème. La présente commission dans la structuration envisagée est plus usuelle dans les situations de changement politique généralement sur fond de différences prononcées. Une première au Burkina Faso mais pas en Afrique puisque selon toute vraisemblance, c'est l'Ouganda d'Idi Amin Dada qui l'a utilisée pour la première fois. C'était en 1974. Encore l'Afrique en mauvais exemple ! La commission la plus célèbre est la Commission vérité et réconciliation de l'Afrique du Sud post- coloniale en 1994. Les travaux ont duré quatre ans. Plus près de nous il y a eu la Commission vérité, justice et réconciliation au Togo en février 2009. Le rapport a été déposé au bout de trois ans. Et il y a plus récemment la Commission vérité et réconciliation de la Côte d'Ivoire post crise électorale de 2011. Le rapport est toujours attendu. Ou encore le Mali consécutivement à la rébellion dans sa partie septentrionale. Dans l'un ou l'autre cas, « Ces organismes officiels, temporaires, non judiciaires d'établissement des faits » ont été d'un très grand apport pour la reconstruction des pays qui les ont initiés. Chaque pays a sa propre expérience en la matière et selon des statistiques d'Amnesty International, de 1974 à 2007, au moins 32 commissions vérité ont été mises en place dans 28 pays (Voir liste en ennexe).
Samuel Somda
Lefaso.net
Les commissions vérité, un phénomène mondial Afrique du Sud : Commission vérité et réconciliation, 1995
Allemagne : Commission d'enquête pour l'évaluation de l'histoire et des conséquences de la dictature du SED en Allemagne, 1992
Argentine : Commission nationale sur la disparition des personnes, 1983
Bolivie : Commission nationale d'enquête sur les disparitions, 1982
Chili : Commission nationale pour la vérité et la réconciliation, 1990 ; Commission nationale sur l'emprisonnement politique et la torture, 2003
Corée du Sud : Commission vérité présidentielle sur les morts suspectes, 2000
Équateur : Commission pour la vérité et la justice, 1996 ; Commission vérité, 2007
Ghana : Commission de réconciliation nationale, 2002
Grenade : Commission vérité et réconciliation, 2001
Guatemala : Commission pour la clarification historique des violations des droits humains et des actes de violences à l'origine des souffrances du peuple guatémaltèque, 1997
Haïti : Commission nationale de vérité et de justice, 1995
Indonésie : Commission vérité et réconciliation, 2004
Liberia : Commission vérité et réconciliation, 2005
Maroc : Instance équité et réconciliation, 2004
Népal : Commission d'enquête sur les personnes disparues pendant la période des panchayat, 1990
Nigeria : Commission chargée d'enquêter sur les violations des droits humains, 1999
Ouganda : Commission d'enquête sur la disparition des personnes en Ouganda, 1974 ; Commission d'enquête sur les violations des droits humains, 1986
Panama : Commission vérité, 2001
Paraguay : Commission vérité et justice, 2003
Pérou : Commission vérité et réconciliation, 2000
République démocratique du Congo : Commission vérité et réconciliation, 2003
Salvador : Commission de la vérité, 1992
Sierra Leone : Commission vérité et réconciliation, 2002
Sri Lanka : Commission présidentielle d'enquête chargée d'élucider les cas de disparition forcée de personnes dans les provinces de l'Ouest, du Sud et de Sabaragamuwa ; Commission présidentielle d'enquête chargée d'élucider les cas de disparition forcée de personnes dans les provinces du Centre, du Nord-Ouest, du Centre-Nord et d'Uva ; Commission présidentielle d'enquête chargée d'élucider les cas de disparition forcée de personnes dans les provinces du Nord et de l'Est, 1994
Tchad : Commission d'enquête sur les crimes et détournements commis par l'ex-président Habré et ses coauteurs et/ou complices, 1991
Timor-Leste : Commission d'accueil, de recherche de la vérité et de réconciliation, 2002
Uruguay : Commission d'enquête sur la situation des personnes disparues et ses causes, 1985 ; Commission pour la paix, 2000
Yougoslavie (République fédérale) : Commission vérité et réconciliation, 2001
(Source : Amnesty International)
via leFaso.net, l'actualité au Burkina Faso http://ift.tt/1tSIytM