Conflits du travail : Il faut des mesures urgentes
Cette adresse que je formule, m'a été inspirée par les cas récents des travailleurs de la société FILSAH, de la SOFITEX et de bien d'autres entreprises et sociétés, plus ou moins suffisamment connues dans le paysage burkinabè. J'avoue qu'elle n'a rien à voir avec l'avènement du CNT, et que sa rédaction date d'environ cinq ou six mois. Dans tous les cas, ceux qui en étaient déjà informés depuis ce temps m'y reconnaîtront, en dépit des dernières modifications que j'ai bien voulu apporter au titre, pour des raisons personnelles.
Par la présente, je lance un appel solennel aux principaux acteurs ou intervenants du monde professionnel, pour qu'ils prennent plus au sérieux les conditions de travail et le statut de travailleur dans notre pays, qui ne cessent de se dégrader au fil du temps. Puisse ma voix, porter le plus haut et le plus loin possible, afin de permettre si possible aux générations nouvelles, de connaître un sort meilleur que celui de la nôtre.
« Les droits de l'employeur :
Le principal droit reconnu à l'employeur, est celui de pouvoir exiger du salarié la prestation de travail pour laquelle celui-ci est rémunéré. Il lui est également reconnu le droit, dans le respect du cadre légal existant, d'organiser le travail à l'intérieur de la structure qu'il dirige, au besoin en usant du pouvoir disciplinaire que lui reconnait la loi ………. »
« Les obligations de l'employeur
L'employeur est tenu aux principales obligations suivantes : Fournir au salarié, un travail correspondant à l'objet, au lieu, aux conditions d'exécution et aux horaires prévus,
Respecter la réglementation du travail, dans toutes ses composantes : Lois, conventions collectives, accords d'entreprise, usages… relative à la durée du travail (durée quotidienne, repos hebdomadaire…), aux congés (congés payés ou congés spécifiques), au salaire (SMIC), à l'hygiène et à la sécurité, à la représentation du personnel, etc., l'employeur est également tenu par les clauses du contrat de travail qu'il a signé avec le salarié ;
verser au salarié, selon la périodicité convenue, le salaire prévu au contrat, accompagné d'un bulletin de paie… »
« Les principaux devoirs et obligations du salarié :
Le salarié est tenu d'exécuter non seulement les obligations fixées par son contrat de travail, mais aussi celles résultant de dispositions légales.
L'exécution consciencieuse du travail fourni par l'employé est la principale obligation découlant du contrat de travail. Elle n'est en fait que la contrepartie du salaire versé par l'employeur au salarié…. »
Voilà entre autres quelques passages, représentant peut-être un tout petit extrait des textes sur le droit du travail, mais suffisamment révélateurs pour illustrer mon propos.
En effet, combien sont-ils aujourd'hui, ces salariés qui peuvent dans tous les secteurs confondus, se payer le luxe de fermer un tant soit peu les yeux, sur tout ou partie de leur obligation d'exécution entière ou totale du travail exigé, sans en payer systématiquement le prix ?
Aucun sans doute, à part les cas d'absences règlementaires ou exceptionnelles, dont ceux-ci bénéficient de temps en temps, au vu et au su de leurs employeurs.
Mais pourquoi alors les employeurs doivent-ils quant à eux, s'autoriser au moindre motif, à soumettre impunément les salaires, avantages ou autres indemnités de leurs employés, à toutes sortes de caprices de leur choix (Refus de paiement d'indemnités règlementaires de stage, rétrogradation de l'employé, libre suspension des salaires comme bon leur semble, mépris des périodicités fixées au contrat, morcellement des salaires etc.), sans le consentement de ces derniers, ni aucune implication de la Direction Générale du Travail ?
Et tout cela, sous le fallacieux prétexte qu'aujourd'hui plus qu'hier, les employeurs sont plus favorisés que les employés, par les textes législatifs.
En témoigne d'ailleurs la multiplication dans tous les domaines, « des contrats de travail à durée déterminée renouvelables », en lieu et place « des contrats à durée indéterminée », qui avaient plutôt cours jadis.
Et dire qu'en se fondant sur telles inconvenances, certaines sociétés n'hésitent pas au moindre motif, à soumettre leurs employés à un chantage permanent de non renouvellement, même après des années de service.
Nul n'ignore que sous nos cieux, au lieu des textes, c'est l'humeur et les sentiments d'égotisme qui prédominent très souvent chez ceux qui commandent.
Sinon comment comprendre qu'au mépris des lois, un chef d'entreprise se permette de nos jours, de privilégier ses besoins d'achat en matière première ou de règlement de ses engagements, au détriment des salaires.
Et cela par pure cruauté, et en se disant intérieurement « Il ne s'agit que d'employés ; qu'ils soient payés le 30 du mois ou le 20 du mois prochain, c'est la même chose »
C'est-à-dire que ces patrons vont même jusqu'à fermer les yeux, ou se soucier très peu du fait que c'est justement à cause des pesanteurs de la vie, que l'on s'engage comme salarié.
Face alors à de telles attitudes de mépris, que reste-t-il à faire pour un salarié, qui doit tout comme son employeur qui semble l'avoir oublié, subvenir tout le mois à ses propres besoins, prendre sa famille en charge, payer ses factures etc.?
Et tout cela, ensemble et à la même période, c'est-à-dire à la fin du mois.
Il faut reconnaître certes, que de manière générale, l'on rencontre très rarement ces cas d'abus, aussi bien dans les Institutions Etatiques, que dans les Entreprises Publiques, déjà Correctement Structurées à l'avance.
Car l'administration de ces types d'entités, est assujettie tant à des règles strictes de gestion normatives, qu'à un code universel d'éthique prudentielle, susceptibles de peu de reproches. C'est d'ailleurs de cette discipline, que ces dernières tiennent leur viabilité et leur longévité.
Mais par contre, dans notre environnement d'aujourd'hui, où le privé côtoie à tout vent le public, et où l'on a de plus en plus affaire à des Sociétés en mal d'orientation et d'organisation, l'on assiste parfois à un phénomène de forte dépendance de leur système de fonctionnement, aux humeurs de ceux qui en sont les dirigeants, et à la mauvaise exploitation des rumeurs qui leur parviennent au quotidien.
A tel point que pour ces derniers, le niveau du salaire et ses modalités de paiement, ne constituent plus une fierté, ni un reflet de la bonne image et de la santé de leur société, mais plutôt une charge qu'il faut réduire ou retarder à tout prix, même à celui de l'illégalité.
Du coup alors, ce que l'on considère économiquement, juridiquement et humainement d'un côté, comme facteur d'expansion de l'entreprise, devient de l'autre, un levier de régulation des autres dépenses aux mains de l'entrepreneur désemparé qui, en s'engageant à fouler aux pieds les droits fondamentaux du travailleur, le soumet à toutes sortes d'angoisses, au moyen d'un scénario d'activation et de désactivation des salaires, selon son bon vouloir.
Mais étant donné que le travailleur est un être social, et que l'entreprise elle-même évolue dans un environnement économique, comment peut-on s'adonner avec mépris à un tel exercice, sans en mesurer les fâcheuses conséquences économiques et sociales ?
Surtout lorsque pour s'attirer certaines faveurs de l'administration, bon nombre de dirigeants de sociétés n'hésitent pas à brandir l'effectif de leur personnel.
Par ailleurs, Il importe de souligner, qu'outre le fait que pour le travailleur et toute sa suite, le salaire constitue un élément vital, la viabilité des contrats qui lient en majorité celui-ci aux autres membres de la société, en dépend entièrement.
C'est la raison pour laquelle, la moindre opération de distorsion portée à son salaire, tend à assombrir la conscience du salarié, et affecte considérablement son environnement (séparation de couples, déguerpissement de maisons d'habitation, résiliations de contrats d'abonnement mensuel…)
En d'autres termes, tout ce qu'il a construit progressivement, s'écroule subitement autour de lui, comme un château de cartes.
Voilà pourquoi, un tel acte posé à son encontre, correspond indéniablement à une atteinte à sa survie, son honneur et à sa réputation.
Il va de soi que pour l'employeur aussi, aucune opération de rescousse financière (Prêts bancaires ou autres), ni publicitaire, ne saurait nulle part en terme de rentabilité, se substituer à la valeur ajoutée apportée par le travail qualitatif, d'employés consciencieux et dévoués.
Autrement dit pour toute entreprise, la combinaison capital/ travail demeure absolument la base essentielle de l'activité.
L'on ne saurait non plus privilégier aux salaires, les autres dépenses ou engagement de l'entreprise, sous des motifs fallacieux, sans tomber dans l'injustice et l'illégalité.
Surtout qu'en cas de récession, celle-ci a tous les droits de recourir à la compression pour motifs économiques, ou à la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation.
Gageons donc qu'avec un œil inquisiteur et une attitude plus agressive, la Direction Générale du Travail et les Centrales Syndicales, songeront à l'avenir, à s'engager à temps et de manière plus active dans les entreprises de la place (Privées ou semi-publiques, commerciales, industrielles ou de services), aux fins d'une meilleure protection des intérêts des travailleurs.
En termes plus précis, à l'instar du Service des Impôts et de la CNSS, la Direction Générale du Travail devrait elle aussi, initier tous les mois des actions de descente dans les entreprises, partout sur le territoire, pour ramener les fautifs à l'ordre.
Ce n'est sans doute qu'au prix de cet engagement, que les employeurs prendront davantage conscience du caractère sacré du salaire, et de la nécessité du respect de toutes les clauses relatives au contrat de travail.
Car à ce jour, l'unique remède susceptible d'être le plus efficace contre les germes d'énormes conflits socioprofessionnels, réside dans cette option anticipatrice, plutôt que celle conservatiste, qui consiste à attendre d'abord les grands chamboulements dans les entreprises, avant d'y intervenir en pompiers.
En tout état de cause, il serait souhaitable que les dirigeants d'entreprises qui ne l'ont pas encore compris, se mettent assez rapidement au pas. Car très bientôt, les contours de certaines cibles se définiront davantage, avec des noms et des critères de désignation plus précis, sous les faisceaux de la seconde partie, du présent « Focus ».
A suivre
Hyacinthe Sanogo
Consultant à Ouagadougou
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