Bottes de censure
La suspension du quotidien » Le Matinal » par le Président de la Haac met en relief la puissance du Président de la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (Haac). En vertu de prérogative légale, le Président de la Haac s’est illustré comme le Tout Puissant Mazembé (TPM). Bien que l’initiative du Président de la Haac est fondée en droit local, elle souffre de pénombre au plan de la convention internationale sur la liberté d’expression (1) et dénote d’une volonté politique de censure (2).
La convention internationale sur la liberté d’expression violée
Le principe est consacré : » La liberté d’expression vaut non seulement pour les » informations » ou » idées » accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent : ainsi le veulent le pluralisme, la tolérance et l’esprit d’ouverture sans lesquels, il n’est pas de » société démocratique « . Ce principe on le retrouve dans la charte africaine des droits de l’Homme et des Peuples tout comme dans la convention européenne des Droits de l’Homme. Le Président de la Haac a fait le choix délibéré de ramer à contre-courant de l’histoire. En effet, une série de cas préalablement portés devant les instances judiciaires internationales ont débouté nombre d’autorités. Ce qui a donné de la lumière au principe suivant lequel une presse libre revêt une importance capitale pour la démocratie. L’obligation est ainsi faite aux gouvernements de tolérer plus de critiques que les citoyens ordinaires. Aussi voudrais-je énumérer un certain nombre de déclarations vigoureuses sur la promotion de médias indépendants et pluralistes, adoptées sous les auspices de l’Organisation des Nations Unies et d’autres organismes intergouvernementaux, par exemple lors des séminaires de l’UNESCO à Sana’a, Windhoek, Santiago, Alma-Ata et Sofia. Tout compte fait, la protection juridique internationale de la liberté d’expression est un fait. Toute violation du droit international de la liberté d’expression ne peut plus échapper à la contestation.
Une volonté politique de censure
Le Président de la Haac ne s’empresse pas de soumettre le cas de » Le Matinal » à la plénière des conseillers de la Haac pour en débattre. Ce qui laisse présager une volonté manifeste de maintenir la suspension. La ligne éditoriale de le Matinal ne saurait être une raison suffisante. Il y a des déclarations pires que les écrits de le Matinal qui sont tenues au sein de l’Assemblée Nationale sans que le journal en question n’ait jamais eu la moindre tentation de relayer les mots des auteurs. Il n’y a pas une volonté de nuire au Président de la République mais une volonté de contester sa gouvernance, ses choix et ses positions. Ce qui est démocratique et constitutionnel. Le Président de la Haac peut convoquer rapidement une plénière pour l’audition du journal. Un journal fermé, c’est une opinion refusée. Il y a lieu aussi pour les associations professionnelles d’appeler les secrétaires de rédactions au choix des mots judicieux. En effet quand les mots sont mal choisis, ils engendrent de pires maux. La censure n’est plus à l’ordre du jour. A moins de vouloir être inspiré par les dictatures naissantes en Afrique Centrale. Loin s’en faut.
Herbert-Tauyé Houngnibo
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