Mousbila Sankara, ancien ambassadeur sous le CNR : « Kéré est un de mes tortionnaires [ …] Il y a des gradés qui ne méritent pas la légitimité »
Des mouvements de la Société civile ont organisé ce jeudi matin, un meeting à la Place de la Révolution pour apporter leur soutien aux autorités de la transition. Cette manifestation fait suite au report du Conseil des ministres à cause de problèmes qui subsisteraient entre notamment le premier ministre et le Régiment de sécurité présidentielle (RSP).
Juste avant la fin du meeting, une intervention a retenu l'attention des quelques centaines de manifestants présents. Il s'agit de celle de Mousbila Sankara, Ingénieur de télécommunication en retraite et ambassadeur du Burkina à Tripoli sous le CNR (Conseil national de la révolution).
Le colonel Kéré dont la nomination fait partie des revendications du RSP, lieutenant et aide de camp de l'ancien président à l'époque, l'a torturé, affirme-t-il.
Promouvoir Kéré comme chef de sécurité du président, c'est pour celui qui dit avoir été emprisonné quatre ans, un drame et exposer la sécurité du président de la transition.
Pendant cinq minutes, le sexagénaire a tenu à faire un témoignage et attirer l'attention de « ses enfants » dit-il. Voici en substance, ses propos.
« Kéré est un de mes tortionnaires. Il a géré au Conseil de l'entente, les séances de torture auxquelles j'ai été soumis pendant que j'y étais détenu politiquement. Parce que je vous rappelle, qu'à l'assassinat de Thomas Sankara, j'ai refusé de représenter le Front populaire à Tripoli, et je suis rentré. Cela m'a valu une détention à la gendarmerie et plus tard au Conseil de l'entente.
Si jusqu'à présent, nous n'avons pas trouvé dans nos hommes en tenue, un officier à même d'assurer la sécurité du président, et c'est ce tortionnaire, qu'on doit encore reconduire pour continuer la gestion de la sécurité de notre président, c'est un drame.
Regardez mes genoux (ndlr il soulève son pantalon pour montrer son genou), le noir que vous voyez, ce n'est pas de la peinture. Ils m'ont fait marcher sur les genoux tout autour du Conseil de l'entente. J'ai été trainé, et quand je dis « je », c'est parce que je ne veux pas avancer les noms de certains qui en sont morts, ou qui aujourd'hui ont pu se ranger ; parce qu'aujourd'hui j'ai vu des éléments torturés qui ont pu travailler avec eux. L'homme étant complexe, je m'en tiens à ma situation.
Quel que soit la compromission que l'extérieur voudrait qu'on fasse, ne permettez pas qu'on nomme encore à un poste aussi stratégique un tortionnaire. Il a torturé Sankara Mousbila (ndlr lui), il nous a mis dans des conditions terribles, et n'eut été la volonté divine, je ne serais pas parmi vous. Mais au moins que vous sachiez, qu'on ne peut pas permettre, qu'on fasse la promotion de n'importe qui, à certains postes. C'est pourquoi j'ai voulu témoigner, afin que vous sachiez que ce n'est pas seulement le principe de grade qu'il faut voir, il y'a aussi d'autres considérations.
Il y a des gradés qui ne méritent pas la légitimité, la moralité.
Je veux aussi attirer votre attention sur un fait. Le RSP, sa mission est claire, c'est assurer la sécurité présidentielle. Nous trouvons que notre président de transition n'est pas en sécurité avec ce RSP. Légitimement, nous pouvons demander un autre RSP. On ne dit pas de renvoyer tous les militaires du RSP. Nous disons de vider le RSP de son contenu actuel qui est ‘'individuelle sécurité président Blaise Compaoré ''. Qu'on leur donne d'autres cadres, et définir une autre forme pour la sécurité du président.
Le peuple a été patient, il s'est mobilisé, il a posé un acte patriotique à travers son sang. Faisons en sorte que nous ne soyons pas multipliables par zéro ».
Propos recueillis et transcrits par Amélie GUE
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