Manifestations des éléments du RSP, contestations contre la nomination de certains dirigeants : des répliques à prendre au sérieux
On s'y attendait. Les répliques sont des secousses secondaires géophysiques bien connues après un tremblement de terre. Elles peuvent être importantes selon des degrés différents. C'est ce que nous traversons après la grande secousse des 30 et 31 octobre dernier. Cependant on doit faire la part des choses entre ce qui est une grande menace, parlant de la paix du Burkina et des Burkinabè, et ce qui peut être considéré comme des répliques qui participent à la reconstruction, voire à une renaissance du Burkina.
La nature de la réplique qui apparaît comme une véritable menace est celle que le RSP depuis le 30 décembre est en train de manifester. Celle-là doit être prise au sérieux et traitée avec vigueur et détermination. Rappelons-le, en décembre dernier les éléments réclamaient entre autre la non dissolution du régiment, le paiement de leurs bonus de fin d'année, et le remplacement du nouveau chef d'état major de la présidence.
Il faut relever que Le RSP est né dans les années de « sang » du Burkina. 15 octobre 1987 et 4 ans de Front Populaire ont été une période des plus sombres du Burkina. C'est en 1995, qu'il a été connu sous le nom de Régiment de Sécurité Présidentielle (RSP). Au fil des années, Compaoré en a eu besoin pour asseoir définitivement son pouvoir. Si fait qu'à partir des années 92, la démocratie était une mystification et n'était qu'un pur régime militaire. Il est donc normal que l'insurrection populaire qui a vu le départ de force ou de gré de Blaise, le RSP ne s'en remette pas aujourd'hui. Les conditions de son départ jusqu'alors confuses, négociées, pas négociées, précipitées certainement, resteront à jamais marquées au fer dans l'esprit des éléments de ce corps psychologiquement anéantis. Au sein même du RSP, il y avait d'énormes contradictions. Seul le grand « sachem » en avait le secret de trouver le remède. Lui-même n'a-t-il pas été victime en mars 2011.
De la situation confuse du départ de Blaise en octobre, certains éléments en ont profité pour prendre leurs « responsabilités ». Responsabilités qu'on leur avait confiées. Mais, ces derniers ont-ils préféré s'affranchir de leurs maîtres en prenant simplement leurs « responsabilités » ? Parce qu'ils ont eu une vraie lecture des évènements des 30 et 31 octobre. Ils ont pris le pouls des évènements et se sont rangés du coté du peuple pour répondre enfin à leurs profondes aspirations, celles de la liberté, de la vérité et de la justice. De l'intérieur ils sentaient peut-être la grogne mais, une fois dehors, ils ont réalisé le fossé entre les habitants de Kossyam et ceux de « Bonheur ville ». Ils ont peut-être trahi leurs mentors. On saura un jour la vérité des pactes qui étaient signés. Aujourd'hui ils sont devenus des hommes à abattre. Comment comprendre qu'eux, appartenant au même corps, ils déclarent le démantèlement du RSP ? Paradoxe des paradoxes. Résultats il faut entraver la marche de la transition en la prenant en otage, en jetant le doute au sein des Burkinabè.
Cette manifestation de la part du RSP prouve que ces hommes n'ont pas digéré les 30 et 31 octobre, ils pensent toujours répondre d'un maître. Illusions ou réalités ? Ils vivent un psychodrame parfait à l'image de tous ceux qui caressent le secret désir que la transition tombe dans le piège et que les troubles s'installent au Burkina pour regretter le « bâtisseur », le « facilitateur ». C'est ignorer la force et les fondements de l'insurrection. Cette deuxième sortie du RSP est la bienvenue parce qu'elle va permettre d'achever ce qui n'avait pas été achevé. Plutôt qu'une menace, c'est l'occasion de discuter les privilèges de cette entité accordés par la République à travers les contribuables.
La seconde nature de la réplique qui se matérialise par les manifestations et protestations tout azimut pour dénoncer, refuser des nominations complaisantes est plutôt constructive. L'excès nuit, sinon le « plus jamais ça » est une expression que la gestion du pouvoir « ne sera plus comme avant ». On assiste dans cette période de transition à la naissance d'associations de veille et de contrôle qui exigent désormais « un devoir de rendre compte », une redevabilité envers les citoyens. Ces répliques sont à saluer et à canaliser. Elles sont constructives car elles appellent une éducation et une formation des masses à devenir citoyens. A ce propos, on a l'impression que les partis politiques ont démissionné et se préoccupent des élections prochaines au lieu de participer à une bonne transition. Ils doivent rester vigilants et remplir leur rôle de formation et d'éducation pour permettre au citoyen de comprendre les répliques et apporter les réponses citoyennes.
Evariste ZONGO
Journaliste
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