Militaires burkinabè et politique : Ce que dit la loi

Publié le vendredi 25 novembre 2016

Dans l’optique de « remédier et d’adapter au contexte actuel » la loi portant statut général des personnels des Forces armées nationales (FAN) promulguée le 25 juin 2015, l’Assemblée nationale a procédé à la relecture de ladite loi ce jeudi 24novembre 2016. La relecture autorise à présent les  militaires à occuper de hautes fonctions administratives.

Avec la relecture de la loi 019-2015/CNT du 05 juin 2015, la nouvelle loi stipule en son article 13 que « le militaire peut être nommé membre de gouvernement et aussi aux hautes fonctions de l’Etat ». La justification donnée est que dès sa promulgation, la loi a fait l’objet de « beaucoup de critiques au sein des forces armées nationales ». S’en est suivie « l’application controversée ». Une situation qui a prévalu à ce que lors du Conseil d’administration du secteur ministériel (CASEM) du ministère de la défense, « l’urgence d’apporter des ajustements » a été évoquée.

Le Président Halidou Sanfo et les autres membres de la Commission de la défense et de la sécurité (CODES) en avaient pris note. Les 14 et 18 novembre 2016, ils se sont réunis pour examiner le projet de loi portant statut général des FAN. Mais ils avaient au préalable donné l’occasion aux représentants du gouvernement de faire un exposé sur la situation qui prévaut.

« Tout citoyen peut être appelé, compte tenu de ses compétences »

Pour la circonstance, le gouvernement était représenté par 12 personnes dont le ministre de la sécurité intérieure Simon Compaoré. Il a été assisté par le Colonel-major Moné Alassane, secrétaire général du ministère de la défense, 08 autres hauts fonctionnaires des forces armées nationales et 02 membres du ministère de la communication. Les commissaires ont souhaité la reformulation de l’article 13, car disent-ils, la fonction ministérielle semble être « a priori » une fonction politique.

Un avis qui n’est pas partagé par les représentants de l’exécutif. Ils ont en effet jugé « assez restrictive » la vision collée à la fonction ministérielle et qui fait d’elle un poste « purement politique ». Selon eux, la mise en œuvre du programme pour lequel le Président du Faso a été élu, passe pour « une question nationale ». Pris sous cet angle, disent-ils, « tout citoyen peut être appelé, compte tenu de ses compétences et de ses qualités techniques à exécuter ce programme  à des niveaux divers de responsabilité ».

Vous avez dit dépolitisation ?

«La dépolitisation de l’armée signifie que les militaires ne doivent pas être membres de partis politiques.  Ça  fait désordre.  Mais lorsqu’un président est élu, son programme devient le programme du peuple. Tous les fils et les filles du Burkina doivent travailler à sa mise en œuvre.  Dans l’armée, il n y a pas que ceux qui savent  tirer,  il  y a des médecins, des magistrats et des ingénieurs», a renchéri le ministre d’Etat en charge de la sécurité intérieure, Simon Compaoré, devant le Parlement ce 24 novembre, selon l’AIB.

En conséquence, disent-ils, le militaire en tant que citoyen peut lui aussi apporter sa pierre «  sans pour autant être militant ou partisan d’un parti politique ».

En effet, même si le militaire est appelé au gouvernement ou à occuper de hautes fonctions administratives, « il doit éviter des prises de positions politiques et partisanes » et il « ne saurait adhérer à un parti ou à un regroupement politique » sous peine de tomber sous le coup de la loi régissant le statut des FAN.

Porté devant l’Assemblée nationale, les députés ont adopté le projet de relecture de la loi qui permet désormais au militaire d’être nommé membre de gouvernement et aussi aux hautes fonctions de l’Etat.

Les colonels Barry et Honoré Lucien Nombré et le CESDS

Le 20 septembre 2016, un groupe d’experts militaires et universitaires présentaient officiellement le Centre d’études, de recherches stratégiques et de défense (CESDS). La création du « laboratoire d’idées », avait indiqué le colonel Barry, ancien ministre de la sécurité, répondait à une nécessité de répondre à l’épineuse question sécuritaire à laquelle le pays est confronté depuis le début de l’année. Il a d’ailleurs défini le centre comme étant un « outil pour relever les défis sécuritaires qui se posent au Burkina et au continent en général ».

Malgré le bien-fondé de l’initiative, ils se sont vu annuler l’autorisation d’adhésion par le commandement militaire. Mais au départ, ces officiers avaient « effectivement » obtenu de la hiérarchie militaire l’autorisation d’une « simple adhésion » à l’association. La justification donnée par les représentants du gouvernement lors de l’audition est qu’« au lancement des activités, le Commandement militaire s’est rendu compte que le rôle de ces officiers dans cette association ainsi que ses objectifs étaient contraires à l’éthique militaire ».

Où en est-on avec la réforme des forces de défense et de sécurité ?

Lors de l’audition, la commission parlementaire s’est aussi intéressée à la réforme en cours du système de défense et de sécurité. Il ressort qu’en ce qui concerne le plan stratégique 2017-2020 voulu par le Chef de l’Etat, le document a été « finalisé et remis » au ministre de la défense.

La réforme est basée sur la nécessité de « revoir le dispositif sécuritaire actuel afin de l’adapter aux nouvelles menaces ». A terme, elle redéfinira le rôle et la place à accorder à la police, à la gendarmerie et à l’armée dans la lutte que mène à présent le Burkina contre le terrorisme qui n’est plus à présent à la porte, car ayant déjà fait environ une cinquantaine de victimes civiles et militaires en à peine un an dans la capitale mais aussi au Nord.

Zida et son grade

A noter enfin que la loi portant conditions d’avancement des personnels d’active des Forces armées nationales a été revue.

«Cette loi avait été modifiée (en 2015) pour  des raisons personnelles, et ce n’est pas juste. C’est  pour cela que nous l’avons revue.  C’est l’ancien Premier ministre, Yacouba Isaac  Zida qui l’avait suscitée pour se nommer général.  Il faut être dans l’armée mexicaine  pour voir  cela», a justifié Salifou Diallo, président de l’Assemblée nationale, toujours selon l’AIB.

Oui KOETA

Burkina24


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