Pénurie de gaz au Burkina : « La solution, c'est d'accroître la capacité de remplissage des bouteilles »
Depuis novembre 2014, les consommateurs du gaz butane sont confrontés à une pénurie criarde du gaz butane. La raison : un problème de remplissage des bouteilles. Tout a été dit ou presque. Mais la solution c'est incontestablement l'accroissement du nombre de centres remplisseurs.
Mercredi 21 janvier 2015,10h. Un camion vient de faire la livraison de gaz au niveau du plus grand dépôt à Kilwin. Là, une centaine de clients attendait, depuis 7h. Aujourd'hui, tous ceux qui étaient dans le rang ont été servis. Mieux, il en reste. Ceux qui viendraient dans une heure au plus tard pourront obtenir du gaz. Après, ce sera trop tard et il faudra attendre le lendemain.
Safoura Soré vient d'être servie. C'est un soulagement parce qu'en venant, elle n'était pas sûre d'en avoir. Le soulagement est encore plus grand chez Balkissa Kaboré. Plus d'un mois et demi qu'elle était retournée au bois de chauffe puisqu'ayant fait le tour d'une dizaine de boutiques sans obtenir du gaz. « Le gaz n'est pas encore venu », « ça vient juste de finir », « il faut repasser demain… peut-être qu'il y aura du gaz ». Partout, ce sont ces phrases qui lui sont servies. Ce matin encore (ndlr : 21 janvier), elle a quitté le quartier non loti de Watinoma pour venir tenter sa chance.
La situation est-elle en train de se décanter
Chez les agents responsables des points de vente du gaz, c'est aussi le soulagement car ils seront épargnés des insultes des clients excédés par cette pénurie. « Aujourd'hui, on est content parce qu'on sait que tous ceux qui sont dans le rang pourront être servis. Si vous étiez venu il y a deux semaines, vous alliez trouver deux ou trois fois ce monde. Je pense que la situation est en train de se décanter », soutient Issa Ouédraogo.
La SONABHY s'est déjà expliquée sur cette pénurie. Tout comme le ministère du commerce. Tous ont toujours fait la promesse que le problème trouvera bientôt une solution. Mais, deux mois après, la pénurie perdure. Et le calvaire des consommateurs aussi.
Mais, le ministère et la SONABHY semblent pointer un doigt accusateur sur les sociétés de distribution. Ces sociétés sont soupçonnées par certains consommateurs de stocker du gaz pour favoriser la spéculation. Aussi, polémique-t-on sur des problèmes de disponibilité de bouteilles.
Pour mieux comprendre, nous nous rendons au siège du plus grand distributeur, la société SODIGAZ. Elle a plus de 60% de clients. La visite des locaux nous permet de constater une logistique impressionnante. Une vingtaine de camions exclusivement chargés du ravitaillement, des milliers de bouteilles neuves entreposées dans des magasins, des charriots pour le chargement des bouteilles, du personnel notamment des chauffeurs qui impatientent…
Tout sauf un problème de bouteilles
C'est donc dire que le problème est tout sauf une insuffisance de bouteilles. Ce n'est pas non plus un problème de camion de ravitaillement ou d'une logistique quelconque. « Nous avons 21 camions d'approvisionnement qui sont chargés exclusivement d'aller chercher le gaz à la SONABHY sise à Bingo. Nous avons entre 17 et 20 camions qui livrent du gaz pour la ville de Ouagadougou. Nous avons aussi des bouteilles neuves (plus de 40 000) qui ont été contrôlées par le BUMIGEB mais que nous ne pouvons pas mettre sur le marché actuellement parce que la disponibilité du gaz nous empêche de les mettre dans le circuit. En termes de logistique (camions ou bouteilles), la SODIGAZ n'a aucun souci pour répondre à n'importe quelle consommation sur toute l'étendue du territoire burkinabè », précise Fabrice Naré, le chargé de communication de la société.
Alors, comment résoudre ce problème de remplissage qui dure plus de deux mois. SODIGAZ a une proposition de solution : avoir son propre centre remplisseur comme l'autorise la loi. Elle en a fait la demande depuis plusieurs années. Mais sans suite. Après la composition du gouvernement de transition, elle a encore renouvelé cette demande. Le ministre du commerce a d'ailleurs confirmé cette demande au cours du point de presse dénommé « Face à la presse », le 24 décembre 2014.
Permettre aux distributeurs d'avoir leurs propres centres remplisseurs
Il avait même promis de se pencher rapidement sur le dossier. Pourtant, chez les distributeurs, on attend encore. A SODIGAZ, on estime avoir les compétences techniques et les partenariats pour le faire. « Une société qui a trois décennies a quand même des partenaires, même au niveau international pour le faire. Nous avons déjà identifié le site pour cela, nous avons les partenariats techniques qu'il faut pour pouvoir installer un centre remplisseur et, naturellement, dans la demande, nous l'avons précisé, ce sera sous la supervision de l'Etat parce que c'est quand même une question sécuritaire importante », explique Fabrice Naré.
Depuis plus de deux décennies, les premiers responsables du pays ont fait la promotion du gaz et ce produit est désormais entré dans les habitudes des burkinabè. Il faut donc œuvrer à le rendre disponible. « Nous sommes un acteur principal du gaz et nous sommes disposés et disponibles pour toutes formes d'initiatives qui puissent nous permettre de trouver des solutions durables et définitives au problème du gaz. Il y a des solutions et la solution c'est d'accroître les capacités de remplissage afin de répondre aux besoins actuels et futurs », confie le chargé de communication du plus grand distributeur de gaz au Burkina.
M. Naré dit déplorer la spéculation autour de la question du gaz butane, tout en s'excusant auprès des consommateurs, même s'il estime que sa structure n'est pas responsable. En tous les cas, sur cette question, il appartient aux structures étatiques chargées du contrôle des prix d'assumer pleinement leur rôle.
Moussa Diallo
Lefaso.net
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