Changement Climatique et Santé: Le triple fardeau pour les pays d’Afrique Subsaharienne

Publié le jeudi 30 juillet 2015

Ceci est une contribution d’un citoyen sur la question des changements climatiques.

Il est désormais reconnu que le changement climatique naguère un concept lointain est devenu une réalité cinglante dans de nombreux pays à travers le monde.

Si les manifestations les plus visibles du changement climatique demeurent les manifestations bruyantes et/ou tangibles comme des pluies diluviennes inhabituelles entrainant inondations et glissements de terrains, les températures trop hautes ou basses et sécheresses, certaines manifestations indirectes demeurent insidieuses, lentes et restent tout aussi préoccupantes. Parmi ces manifestations nous pouvons citer les effets sur la santé humaine et animale.

Le dernier rapport de la commission Lancet pour le changement climatique publié le 22 Juin 2015 [1] situe l’ampleur et les enjeux des changements climatiques sur la santé pour les années futures mais rappelle tout autant qu’agir sur les déterminants connus des changements climatiques représente l’opportunité d’accomplir les plus grands progrès pour la santé publique au cours du 21e siècle.

Ce rapport scientifique, fruit de la collaboration entre centres académiques en Europe et en Chine montre que les progrès constants de la santé globale soutenus par des décennies de développement économique pourraient être vite balayés par les effets sanitaires induits par le changement climatique.

Ainsi, ces effets indirects susceptibles de s’amplifier de manière incontrôlée sont avant tout la pollution atmosphérique, la prolifération des vecteurs reconnus de maladies, l’insécurité alimentaire et la sous nutrition, les déplacements de population et les maladies mentales…

Pour des pays d’Afrique au sud du Sahara déjà en proie à une vague silencieuse de maladies non transmissibles (MNT) venue en rajouter au défi permanent du contrôle des maladies infectieuses, les effets du changement climatique sur la santé apparaissent comme le troisième fardeau de trop. Les MNT sont devenues la première cause de décès dans le monde avec 38 millions de vies perdues en 2012 dont près des trois quarts ainsi que la majorité des décès prématurés (82 %) sont survenus dans des pays à revenu faible ou intermédiaire [2].

Alors que les politiques globales de santé ont à peine balisé le terrain de la lutte contre les maladies non transmissibles à travers l’adoption de neuf cibles mondiales [2] volontaires à atteindre d’ici 2025, le changement climatique et ses effets sur la santé intervient de façon dramatique comme une nouvelle donne quasi incontournable dans la stratégie d’atteinte des cibles.

« Le monde est arrivé à un tournant de l’histoire des maladies non transmissibles (MNT) et n’a jamais été aussi bien placé pour modifier son cours.. » rappelle Dr Margaret Chan Directeur général de Organisation mondiale de la Santé. Un engagement systématique dans la lutte contre les changements climatiques est un moyen aujourd’hui soutenu par des évidences de renforcer cette opportunité.

Pour illustration, la cible mondiale 1 se donne pour ambition la réduction relative de 25 %, d’ici 2025, de la mortalité globale par maladies cardiovasculaires, cancer, diabète ou maladies respiratoires chroniques. Or, le rapport Lancet montre que toutes les stratégies de mitigation du changement climatique ont des effets Co bénéfiques sur la santé. Ainsi, la réduction des émissions de gaz polluant (combustion du charbon noir et émissions des moteurs) à travers l’utilisation croissante d’énergies propres et renouvelables comme le solaire contribuera également à la réduction des maladies chroniques respiratoires.

L’idée émise par les auteurs du rapport de la création d’une commission 2030 sur changement climatique et santé semble rencontrer l’assentiment des acteurs de la santé globale et permettrait d’organiser et optimiser la stratégie mondiale de riposte et ceci de manière intégrée avec les défis sanitaires en cours.

Au Burkina Faso, nous ne devrons pas attendre que cette initiative se traduise en programme vertical impulsé par l’organisation mondiale de la santé à travers son bureau Afrique mais plutôt encourager la prise d’initiatives à la base par les organisations de la société civile et autres ONG pour anticiper le besoin d’acteurs multidisciplinaires lorsque les politiques se feront formelles sur la question. Pour une fois, le leadership et les initiatives peuvent venir de la base pour faire la jonction avec les politiques de santé ou même les susciter selon une approche « bottom-top ».

Les nombreuses évidences scientifiques disponibles pourront déjà servir d’ancrage à des actions intégrées avec les politiques sectorielles des différents ministères avec pour finalité de rendre concret et accessible par tous des actions quotidiennes entrant dans le cadre des stratégies d’adaptation et de mitigation des changements climatiques.

Chaque ministère pourrait décliner en son sein des actions spécifiques entrant dans ce cadre et il est grand temps que l’éducation au développement durable qui comprend l’introduction aux changements climatiques soit intégré dans les curricula scolaires. Le nouveau mot d’ordre ? Luttons contre le changement climatique et on ne s’en portera que mieux.

Abdrahamane Ouedraogo

Coordinateur Association Mahidol de Santé Publique

Membre Association Burkinabé de Santé Publique

Représentant IAAI au Burkina Faso


 

Références

1. http://ift.tt/19ISRwW

2. OMS : Rapport sur la situation mondiale des maladies non transmissibles 2014

a. L’Association Mahidol de Santé Publique fait de son credo la prévention et le contrôle des Maladies Non Transmissibles à travers la promotion d’une culture de la santé en Afrique de l’Ouest mahidolpha@gmail.com

b. L’Association Burkinabé de Santé Publique est l’Association Nationale de Santé Publique, membre des fédérations Africaine et mondiale des associations de santé publique (www.wfpha.org)

c. IAAI est l’Association Internationale pour la Promotion des Approches Innovatrices face aux défis globaux (www.glocha.info)


via L'Actualité du Burkina 24h/24 http://ift.tt/1LZ1aWk