Pour une affaire de gel, la gendarmerie l'interpelle, perquisitionne chez lui sans mandat
TBI est encore sous le choc avec ce qui lui est arrivé le 14 mars dernier. Alors qu'il était en partance pour son village, ce citoyen a été, dit-il, pour une affaire de gel, interpellé, suite à une dénonciation calomnieuse, par des éléments de la Brigade ville de Boulmiougou ; qui ont par la suite perquisitionné chez lui sans mandat. Le récit de sa mésaventure…
« En route pour mon village en vue de participer à des fiançailles de ma nièce, j'ai été victime d'une dénonciation calomnieuse suivie d'une perquisition de la gendarmerie. Tout a commencé lorsque j'ai garé ma motocyclette devant une boutique dans le quartier Pissy pour acheter de l'eau en sachet aux environ de 12 h 45mn. Dès le seuil du hangar de la boutique, j'ai demandé de l'eau au boutiquier. Ce jeune homme me tend un sachet d'eau. Je commence à boire tout en lui disant de me donner trois autres sachets d'eau à emporter. Il s'y afférait quand je suis sorti pour me rincer les mains avec le restant de l'eau. Aussitôt fini, je sors mon gel antibactérien à la devanture du hangar pour m'essuyer les mains, car auparavant j'ai quitté le CMA de Pissy où j'ai rendu visite à un malade. Quand je me frottais les paumes induites de gel, le boutiquier se dirigeait vers un maquis à proximité de son commerce en interpellant les gens : « venez… venez… ». Resté au bord de la route goudronnée, je l'attendais pour lui remettre son argent avant de partir. Mais grand fut mon étonnement quand il a ajouté : « venez … venez … Il a sorti comme du parfum et dès que j'ai senti l'odeur on dirait que je veux m'endormir. » Je me précipite alors vers lui pour le rassurer que c'est du gel antibactérien et non du parfum que des personnes malveillantes utilisent pour tromper les citoyens. Les gens sortent du maquis pour défendre le boutiquier. L'un d'eux retire mon gel et non content de m'accuser d'être délinquant il me somme de me taire parce que je parle beaucoup : « Tu sais qui je suis, tais-toi… » Un autre homme m'invite à m'asseoir autour de leur table, le temps qu'il appelle le responsable de la boutique pour le rassurer que ce n'est que du gel. L'un de leur ami me présente sa carte à distance et je comprends qu'ils sont de l'armée. Je leur dis également que je suis journaliste. Ils m'interdisent de communiquer avec mon téléphone portable. Là encore, ma surprise fut grande parce qu'après plus d'une demie- heure d'attente, au lieu du patron du boutiquier c'est la gendarmerie qui débarque. Deux gendarmes me menottent et direction la brigade ville de Boulmiougou. Dès notre arrivée, le major laisse entendre : « c'est du gel antibactérien ! ». J'ai même vu les mêmes formes de gel sur sa table. Suite à un interrogatoire je lui dis que je suis un citoyen de profession journaliste. Après avoir fait relever mon identité et pris des contacts de personnes à prévenir, on me fait attendre à l'accueil. Environ 40 mn passées, le major me rappelle, me soumet au même interrogatoire et instruit de faire une enquête ‘'d'environnement'' sur moi. Le gendarme me conduit sous un hangar dans l'enceinte de la brigade. On reprend mon identité, des adresses de journalistes avec qui on peut se renseigner sur ma personne. Entre temps je reçois un appel de mon épouse, on m'autorise à décrocher. Elle me demande pourquoi je ne suis pas encore au village. Je lui explique la situation. Elle alerte sa famille et quelques personnes ‘'suffisamment'' responsables arrivent sur les lieux. Les gendarmes ne s'occupaient plus de moi. L'un de mes beaux-frères les approche et on le somme d'aller patienter. Le major qui faisait des vas- et -viens dans la cour ne dit plus rien non plus. Il démarre son véhicule et s'en va. Les deux gendarmes, celui chargé de l'enquête ‘'d'environnement'' et son collègue sans répondre à mes beaux-parents m'interpellent : « quand il y a des problèmes il faut éviter d'alerter la famille… Nous sommes une nouvelle génération de gendarmes nous n'avons pas peur de faire notre travail. » Sans appeler les journalistes pour se renseigner, sans aucune confrontation avec mes accusateurs que j'avais laissés dans le bureau du major, ils m'embarquent pour une perquisition à mon domicile. Mon salon a été passé au peigne fin. Mes livres sur le journalisme, l'intérieur du salon, le contenu de mon frigo, etc. ont été photographiés. Ma belle-famille qui n'avait pas accès à ma maison demande du dehors : « avez-vous un mandat de perquisition ? Ils arrêtent la fouille et courent lui répondre : « Au Burkina Faso, la loi n'autorise pas à un officier de police judiciaire d'avoir un mandant pour perquisitionner. » La discussion devient longue. Je les invite à finir leur fouille parce que je ne tenais plus. Cette fois-ci, ma chambre est visitée. Mes documents, mon parfum, le contenu de mes tiroirs, ma douche interne ont été photographiés visiblement à l'aide du portable d'un des gendarmes. Même mon matelas a été renversé. Fini la fouille, ils se présentent à mes beaux-frères. Visiblement ces gendarmes connaissent certains d'entre eux. Ils les rassurent qu'ils vont me relaxer. Ils me demandent si je vais rentrer dans leur véhicule ou je vais suivre ma belle-famille. Je leur réplique que je rentre chez ceux avec qui j'étais venu. Dans le véhicule l'un d'eux qui était en communication raconte : « ce n'est pas un petit journaliste hein ! Il a les relations. Des 4X4 sont venus nous encercler ici. » De retour à la brigade de gendarmerie de Boulmiougou, on me fait signer une décharge inscrite dans leur registre qui montre que j'ai récupéré ma moto qu'ils avaient dit au boutiquier d'amener à la brigade. Pour eux, c'est mission accomplie ; je peux disposer. Je leur réponds que ce n'est pas la moto qui a fait l'objet de mon interpellation. Je demande à parler au major. L'officier de police judiciaire me répond que si je m'adresse à lui c'est comme si je m'adressais au major. Je réplique que même si le major est parti je reviendrai le voir parce qu'il n'y a pas eu de confrontation et que l'affaire ne pouvait pas se terminer ainsi. Son collègue me dit de ne pas jeter de l'huile sur le feu. Je récupère les clés de mon engin et mon gel antibactérien aussi. Je sors de la brigade avec beaucoup d'interrogations. Seuls les gendarmes savent ce qu'ils semblaient me reprocher. Ce que je sais j'ai utilisé du gel antibactérien en ce temps de grande sensibilisation sur les mesures d'hygiène à observer contre Ebola. Il n'y a pas eu de confrontation avec mes accusateurs. J'ai donné des contacts d'hommes de médias et de mes parents qu'ils n'ont pas appelés. Je ne comprends pas l'objet de la perquisition d'autant plus qu'il n'y a pas eu de suite. Je ne sais pas s'ils l'ont fait par plaisir ou quoi.
En tous les cas, je souhaiterais qu'on m'explique le bien fondé de tous ces agissements. J'ai raconté cette affaire à des personnes avisées, ainsi qu'à certains journalistes. Certains ont relaté l'information. Je suis toujours dans la réflexion ».
T.B.I
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