Inombié Hubert Soulama : « J'ai démissionné du Conseil de gestion de l'UNPCB parce que j'ai constaté que les producteurs de coton sont pris en otage par un groupuscule »

Publié le jeudi 5 février 2015

Si dans la Région des Cascades il revenait de classer les grands producteurs de céréales ou de coton, Inombié Hubert Soulama serait parmi les meilleurs. C'est d'ailleurs ce qui lui a permis d'être élu d'abord à la tête de l'Union départementale des Producteurs de Coton (UDPC) de Soubakanièdougou, puis Président de l'Union Provinciale des Producteurs de Coton (UPPC) de la Comoé, et Secrétaire Général de l'Union Nationale des Producteurs de Coton (UNPCB) à sa création en 1998. Dans l'équipe de Karim TRAORE, M. Soulama était membre élu du Conseil de gestion de l'Union Nationale des Producteurs de Coton du Burkina, d'où il a rendu sa démission avant que la structure faîtière des producteurs de coton ne soit secouée par la crise qu'elle vit actuellement. C'est ce Monsieur que nous avons rencontré pour qu'il nous donne sa lecture des événements que connaît l'UNPCB. C'était le mardi 3 février 2015 à Banfora.




Lefaso.net : Bonjour monsieur, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?


Soulama Inombié Hubert (SIH) : Je m'appelle Soulama Inombié Hubert, je suis producteur basé à Soubakaniédougou, Province de la Comoé, Région des Cascades. J'étais membre élu du Conseil de gestion de l'Union Nationale des Producteurs de Coton du Burkina (UNPCB). Et je viens de démissionner il y a à peine deux semaines.


Est-ce que vous pouvez nous dire pourquoi vous avez démissionné du Conseil de gestion de l'UNPCB ?


Je rappelle d'abord que je fus l'un des créateurs de l'initiative de l'organisation du monde paysan, filière coton. Nous avons créé les Groupements de Producteurs de Coton (GPC), ensuite nous avons sensibilisé et mobilisé pour la création des Unions Départementales des Producteurs de Coton (UDPC) et des Unions Provinciales des Producteurs de Coton (UPPCB). C'était pour mettre en place une organisation nationale des producteurs de coton qui est l'Union Nationale des Producteurs de Coton du Burkina (UNPCB). C'était pour défendre les intérêts des producteurs de coton, des partenaires de la filière coton. Lorsque vous voyez que l'objectif que vous vous êtes assigné au tout début de la création de l'UNPCB n'est plus respecté, lorsque vous voyez un virement alors que la voie est bien connue, ça laisse à désirer et c'est ce qui m'a amené à rendre ma démission. L'UNPCB a atteint un niveau où le respect des règles et des statuts n'était plus à l'ordre du jour. L'UNPCB était devenue autre chose qu'une organisation paysanne. Pire, je voyais que les gens, au lieu d'utiliser l'organisation pour emmener les producteurs à mieux se prendre en charge, l'ont plutôt utilisée pour exploiter les producteurs. Ma formation sociale et ma conviction religieuse ne me permettent pas de continuer avec ces gens-là dans cette voie. Voilà ce qui m'a poussé à la démission.


Quelle lecture faites-vous de la situation présente de l'UNPCB ?


Avant d'en arriver à la situation qui prévaut actuellement au sein de notre organisation, vous me permettrez de vous dire d'abord quelle était la situation. Quand j'étais à l'UNPCB, j'ai constaté qu'elle était gérée comme une famille. En tant que membre du Conseil de gestion, j'ai attiré l'attention des autres camarades même du premier responsable de l'UNPCB qui ont trouvé en cette façon de faire, une manière de s'enrichir. Ce qui arrive aujourd'hui, qu'il y ait des protestations contre le président et le Conseil de gestion, moi personnellement ça ne m'a pas surpris. Lorsqu'une organisation est transformée en parti politique, lorsque son siège sert à abriter les réunions d'un parti politique, ce qui arrive aux politiques lui arrive aussi. L'UNPCB est gérée avec un programme triennal d'activités. Et lorsqu'une activité ne figure pas dans ce programme, cela doit faire l'objet d'une réunion des élus du Conseil de gestion pour juger de son opportunité et de sa pertinence avant de l'entériner. Mais à l'UNPCB sous Karim Traoré, ce sont deux personnes qui se retrouvent, sans en informer les autres, décident de ce qu'il faut faire. Cela ne peut que nous amener à la situation que nous connaissons actuellement. Je vais vous dire qu'à l'UNPCB, du gardien à la coordonnatrice, toute personne qui manifestait son appartenance à un parti politique autre que le CDP, avait des problèmes de toutes sortes. Alors que notre organisation est apolitique. C'est une organisation paysanne et c'est tout.

Au jour d'aujourd'hui, la situation est tendue. Les producteurs de coton sont pris en otage. Cette prise en otage, je peux la subdiviser en trois groupes. Le premier groupe le plus nombreux, constitué des producteurs de base regroupés au sein des GPC, UDPC et UPPC, ignore la réalité de ce qui se passe à l'UNPCB.


Le second groupe composé de certains élus nationaux et de certains techniciens, est conscient que les producteurs de coton sont pris en otage. Mais leur problème est qu'ils n'ont pas de solution pour se libérer. Ils ne sont pas sûrs de l'aboutissement de leur lutte, donc ils se résignent, parce qu'ils se sont laissés souiller.

Le troisième groupe avec Traoré Karim en tête est le chef des preneurs d'otages. Un petit groupe qui sait que c'est lui qui a pris les autres en otage et qui se dit « si nous devons partir, il faut que tout casse ». C'est ce que je tenais à dire. S'il y a deux versions des choses, la solution c'est de chercher à entendre les deux parties avant de décider. Et il faudra qu'une décision soit prise par les plus hautes autorités dans les meilleurs délais.


Quelle vision avez-vous de l'UNPCB pour le futur ?


Ma vision de l'UNPCB dans le futur, c'est une organisation forte, apolitique, représentative, respectueuse de ses textes et qui fait référence dans la sous-région et dans le monde, conformément à nos objectifs à la création de l'Union Nationale des Producteurs de Coton du Burkina. J'étais le Secrétaire Général de l'UNPCB en 1998. Et avant ça, nous avons lutté pour en arriver à cette organisation faitière. L'idée réelle de l'UNPCB est d'arriver à une ONG, en laquelle tous les producteurs auront confiance parce que c'est leur structure.


Entretien réalisé par Golleau Isidore TRAORE

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